L’IA nous remplacera-t-elle ? Ce numéro de CQFD décortique les meilleures campagnes dopées à l’IA. Spoiler : les créatifs n’ont pas dit leur dernier mot.

Vous savez ce qu’ont en commun la création de contenu, mon mec après une soirée arrosée et une voiture Renault ? La panne, parfois.

Difficile d’enchaîner après une intro pareille hein, mais faisons simple : pour ce troisième numéro, je voulais parler de poésie — Printemps des poètes oblige. Le blem-pro, c’est qu’au fil de mes recherches, je n’ai rien trouvé de tout à fait satisfaisant. Tout ce que j’ai trouvé, en fait, c’est une campagne intitulée « Va chier » pour encourager au dépistage du cancer colorectal, à l’occasion de Mars Bleu. Excellente campagne au demeurant, avec un sens pour le moins singulier de la formule mais… Pardonnez-moi l’expression : je l’ai dans le cul.

Je révise ma copie, et m’affaire à trouver un autre thème : et c’est l’IA qui m’a finalement inspirée. Alors, sans transition, sachez que ce numéro est finalement consacré aux contenus qui ont flirté avec l’IA. Et en même temps, passer de la poésie à l’IA n’est pas si absurde quand on sait que 1 600 anglais ont déclaré préférer les poèmes écrits par ChatGPT à ceux de Shakespeare, les jugeant plus accessibles, plus directs et dans un langage facile à comprendre. No comment, et passons aux choses sérieuses.

Seul vestige du thème initial, compatible avec cette réorientation éditoriale douloureuse : BIC. Il y a quelques jours, la marque a utilisé l’IA pour réécrire La Tragédie de Roméo et Juliette avec la calligraphie de Shakespeare (et avec un seul stylo, aussi).

En effet, pour célébrer les 75 ans du stylo Cristal, BIC a imaginé une campagne qui allie innovation technologique et amour des lettres. La marque a ainsi entrepris l’ambitieux défi de réécrire l’intégralité de Roméo et Juliette avec un seul stylo… Et en respectant la calligraphie originale de William Shakespeare grâce à l’intelligence artificielle. L’objectif ? Prouver l’endurance du stylo Cristal en transcrivant les 212 pages de l’une des pièces les plus célèbres de Shakespeare. Je suis bluffée.

Rodrigo Iasi, Directeur marketing Brésil et Argentine, a expliqué que « le stylo BIC Cristal a toujours été un symbole de simplicité et de fiabilité. En réécrivant Roméo et Juliette avec un seul de nos stylos, nous rendons hommage à la puissance de l’écriture et à la créativité infinie qu’elle permet. » C’est un 10/10.

Source : Creapills

Histoire de flirter encore un peu avec littérature, je vous partage une campagne qui aurait mérité d’être davantage saluée encore : il y a 3 ans, l’agence Brainsonic Live avait imaginé une campagne pour Bescherelle. L’objectif ? Rappeler l’importance de l’orthographe, montrer que les IA étaient aussi dépendantes des demandes de leurs utilisateurs et qu’une bonne maîtrise de la langue française et de ses subtilités étaient de rigueur. Une démonstration par l’absurde parfaitement équilibrée.

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Depuis, les IA ont bien évolué, c’est vrai — et il y a de quoi s’émerveiller.

Il y a quelques semaines, c’était d’abord St Gobain Abrasives Inc, leader mondial de la construction durable, qui présentait une campagne innovante dopée à l’IA : comment l’intelligence artificielle imagine t-elle l’urbanisme de 2050 ? L’ambition : explorer ce que l’IA envisage comme futurs possibles de l’architecture et de la construction.

Source : J’ai un pote dans la com

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Saint-Gobain a collaboré avec l’agence Heaven pour demander à 4 artistes experts en intelligence artificielle (AI artists), Hedy Magroun, Aurélien Pakula-Rayssac-Baures, Stéphane Munnier et Sandramaria „San” Schweda, d’imaginer les villes de 2050 sur la base d’éléments de contexte fournis par le Groupe.

Intitulée « Les 7 portes vers le futur », la campagne propose un voyage immersif à travers différentes villes du monde : des éco-quartiers européens, aux pieds de gratte-ciel en Afrique de l’Ouest, en passant par des villes insulaires du Pacifique ou de Floride, sans faire l’impasse sur le futurisme Doubaïote. La campagne a été conçue en 2 phases : dans un premier temps, un film master immersif, dans un second, une série de vidéos interviews avec des experts, à la manière des vidéos en split screen tendances sur TikTok.

Ce qui est plutôt cool avec l’IA, c’est que c’est un outil malléable et ça donne lieu à des créations vraiment variées. Celle qui m’a laissée bouche bée, c’est aussi celle pour vendre le gel douche Original Source. Je n’en dis pas plus et je vous laisse juges :

Cette pub a été réalisée à 90 % avec l’IA : seuls les plans d’intro et d’outro sont réels.

Mais au-delà de la prouesse technique, ce spot livre un exemple concret qui a de quoi rassurer celles et ceux qui pensent que l’IA va nous remplacer. Chris Boyle expliquait au média shots que le processus avait nécessité un important travail en post-prod. Dès le départ, l’utilisation de l’IA faisait partie intégrante du concept. Et contrairement aux idées reçues, l’IA n’a pas remplacé les créatifs, mais les a assistés. L’équipe de Private Island a utilisé des outils d’IA pour générer les visuels les plus fous, tout en les retravaillant avec des méthodes traditionnelles.

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En clair, l’IA a permis de créer des images d’une richesse visuelle remarquable, tandis que les artistes ont affiné, corrigé et intégré ces éléments dans le film final.

Source : Creapills

En 2023, The Coca-Cola Company signait aussi un bijou de production avec Masterpiece, une vidéo réalisée avec des IA. Et deux ans plus tard, ce spot n’a pas pris une ride (contrairement à ma mère) — de quoi reconnaître à Coca-Cola des talents créatifs remarquables, n’en déplaise à celles et ceux qui ont vomi sur le spot de Noël 2024.

Il est fou de constater ô combien l’IA cristallise quasi-systématiquement les discussions, plus encore que la politique de Trump ou la pizza à l’ananas. Pourtant, l’IA est un outil formidable et sa bonne utilisation ne dépend que de nous.

Très récemment, la marque brésilienne Piracanjuba ProCampo s’est associée à l’Association Mães da Sé pour lancer une campagne inédite baptisée « Desaparecidos », qui utilise l’IA pour recréer les visages de personnes disparues depuis plusieurs décennies. Inspirée d’une initiative des années 80 aux États-Unis, où des photos de disparus étaient imprimées sur des cartons de lait, cette version exploite les nouvelles technologies pour améliorer les chances de les retrouver et ça mérite d’être salué.

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Source : Creapills


Après, l’IA, c’est aussi et surtout un fabuleux terrain de jeu.

Vous êtes-vous déjà demandés si un algorithme pouvait défier l’une des recettes les plus emblématiques au monde ? C’est le pari fou relevé par KFC Canada. Au cours de sa dernière campagne, en collaboration avec l’agence Courage, la chaîne de restauration rapide a décidé d’opposer la recette mythique du Colonel Sanders à une recette générée par IA. L’objectif ? Montrer que, même à l’ère des technologies de pointe, le goût authentique reste une affaire… humaine ?

Pour cette opération, KFC a fait appel à une intelligence artificielle afin d’analyser les meilleures recettes de poulet frit en ligne et de proposer sa propre version du plat culte. La marque a ensuite organisé une dégustation à l’aveugle. Et le verdict est sans appel : les participants ont largement préféré le poulet KFC. Ouf !

1-0 pour les humains, donc. De quoi contrarier d’ailleurs les plans de la start-up Artisan, qui encourageait il y a quelques mois à « ne plus recruter d’humains », parce que « les employés IA ne demandent jamais une augmentation » dans une campagne de notoriété lancée fin 2024. Saluons l’audace de cette campagne dystopique, parce que même Georges Orwell ne l’avait pas vu venir celle-ci.

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Sans surprise, aussi prévisible qu’un jour pluvieux en Bretagne, la campagne a largement été critiquée. La marque s’est expliquée et pour les plus curieux, je vous glisse ça juste ici. C’est k-do.

Mais le prix de la meilleure opé. dopée à l’IA, pour ce troisième numéro de CQFD, est decerné à Three UK qui a utilisé l’IA pour ramener à la vie Lily Parr, joueuse de football hémérite. Elle a marqué plus de buts que CR7 et pourtant, peu connaissent son nom.


Une initiative poignante de l’opérateur Three UK donc, pour corriger une mémoire collective quelque peu lacunaire. Car malgré l’engouement autour de la victoire des Lionnes à l’Euro 2022, une étude révèle que 52% des Britanniques ignorent que le football féminin a été interdit pendant 50 ans par la Fédération anglaise de football. Pire, 44% ne peuvent citer aucune joueuse.

Pour redonner voix et visage à Lily Parr, la marque britannique s’est entourée d’experts : une historienne, une ancienne star du Chelsea FC Women, ainsi que des spécialistes de l’IA. Cartographie 3D, détection de points faciaux, animation numérique et deepfake réaliste, le tout alimenté d’archives et de témoignages historiques : l’opération repose sur des technologies avancées. Et le résultat est nettement plus quali que les filtres TikTok, hein. Un acteur a prêté sa performance pour capturer les expressions de Lily, tandis que l’IA a généré ses réponses dans une interview fictive avec Karen Carney OBE OLY. Le résultat est littéralement fou : une rencontre intergénérationnelle entre deux icônes du football féminin, et là encore, une démonstration sans appel de la complémentarité des IA et des humains.

Alors, pour boucler la boucle (et le bec de certains), j’ai demandé à une légende, à un AI Artist, ce qu’il en pensait. J’ai envoyé un SMS à Pierrick Chevallier, qui a récemment rejoint le tournage de la saison 2 de House of David produite par Amazon, en qualité de VFX AI Prompt Artist / Photoshop Editor et je lui ai demandé quel impact les IA ont-elles sur les métiers de la création visuelle.

Sa réponse :

Pour moi, les IA ont déjà commencé à transformer les métiers de la création visuelle. Elles sont là, intégrées dans nos outils du quotidien — que ce soit dans Photoshop, dans les logiciels de montage, de 3D, ou même dans les générateurs d’images. Ce n’est plus une question de futur.

Mais ce qui reste essentiel, à mes yeux, c’est l’idée de base. L’IA ne remplace pas la créativité humaine. Ce qui compte, c’est ce qu’on a à dire, notre capacité à raconter une histoire, à transmettre une émotion, à créer quelque chose de sincère.

On est en train de vivre une véritable révolution, et personnellement, j’adore ça. Il y a tellement de choses à inventer, à apprendre, à détourner. Les possibilités sont infinies — et ça, c’est ultra stimulant.

Et puisqu’il n’est vraisemblablement plus question de s’y préparer, mais bien de s’y inscrire, je lui ai demandé comment les profils créatifs pouvaient-ils embrasser cette évolution.

Sa réponse :

Cela fait déjà un moment que de nombreux artistes ont commencé à intégrer les outils d’IA dans leur pratique, à les tester, à les optimiser. Le véritable défi aujourd’hui, ce n’est plus de les adopter, mais de suivre le rythme effréné de leur évolution. Chaque semaine, de nouveaux outils, de nouvelles fonctionnalités, de nouveaux workflows apparaissent. Faire de la veille technologique est presque devenu un job à temps plein.

Il y a aussi, bien sûr, beaucoup de réticence. Certains profils restent méfiants, souvent par peur de perdre leur place ou leur légitimité. Mais à mes yeux, c’est avant tout une évolution naturelle de nos métiers. Quand on comprend que l’IA n’est pas là pour nous remplacer, mais pour élargir notre champ d’action, tout change.

Travailler main dans la main avec ces technologies, les combiner avec des méthodes plus traditionnelles, c’est ouvrir la porte à des perspectives incroyables. Ce qu’il faut, c’est accepter le changement, être curieux, tester, détourner, s’approprier les outils. C’est en plongeant dedans qu’on découvre à quel point ils peuvent nourrir notre créativité.

Bref,

J’espère que vous avez passé un bon moment. D’après ChatGPT, oui.

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C’est pas moi qui l’ai dit.

Je vous embrasse,

C’était du contenu comme on l’aime,
C’était du contenu de qualité,
Bref, CQFD.

Mélinda avec un 𝗠